N°19 – Semaine du 26 octobre 2020
CONFINEMENT : UNE DEUXIEME VAGUE D’INCERTITUDE POUR LE SECTEUR AGRICOLE ET AGROALIMENTAIRE
Alors que l’annonce d’un nouveau confinement national vient d’être acté par les pouvoirs publics, la chaîne alimentaire se retrouve, à l’instar de nombreux autres secteurs, face à une nouvelle vague d’incertitudes. Si l’approvisionnement alimentaire va résister, comme les acteurs du secteur ont su le prouver lors de la première vague, c’est la conséquence à long terme de ce nouveau confinement qui pose question. Après la fermeture des bars, les nouvelles mesures sanitaires impactent d’une manière radicale l’activité des restaurateurs et donc de leurs fournisseurs parmi lesquels les agriculteurs français. Certaines filières agricoles, seront d’ailleurs plus impactées que d’autres par ce re-confinement, car principalement dépendantes des débouchés dans la restauration et les bars. C’est le cas pour le secteur des boissons avec les filières viticole, cidricole, brassicole mais aussi les filières pommes de terre industrielles, volailles, foie gras et piscicole. En effet, ces activités dépendent essentiellement de leurs débouchés en Restauration Hors Domicile (RHD) : pour le foie gras, par exemple, cela représente 40% des débouchés commerciaux, le montant des pertes dues à la crise de la Covid-19 s’élevant déjà à 50 millions d’euros. Pour la filière viticole, la perte est estimée à 400 millions d’euros (chiffre CNAOC), si les mesures sur les bars et restaurants venaient à perdurer. C’est donc tout un secteur, allant de la fourche à la fourchette, qui attend un soutien fort de l’Etat et le lancement d’une campagne massive de sensibilisation des consommateurs à l’impératif de « manger et boire Français » afin de préserver, à l’avenir, des territoires agricoles vivants.
SÉCHERESSE 2020 : URGENCE A AGIR DANS LE CADRE DU PLFSS 2021
Comme le précise Météo-France, l’été 2020 aura été « le plus sec depuis le début des mesures des précipitations en France en 1959 ». Un triste record qui impacte, au-delà de l’alerte climatique globale, de nombreuses productions animales et végétales nationales. A ce titre, cette situation a entraîné une moisson catastrophique, de même niveau que celle de 2016. Ces épisodes de sécheresse n’ont fait qu’aggraver la situation économique d’exploitations agricoles déjà fortement fragilisées par la crise sanitaire de la Covid-19. En réponse à cette situation, la FNSEA défend, dans le cadre des discussions budgétaires en cours au Parlement et plus particulièrement dans le PLFSS 2021, une proposition conjoncturelle visant à soutenir d’urgence la trésorerie de ces exploitations agricoles. Le but de cette proposition est de permettre aux exploitants de calculer leurs cotisations et contributions sociales sur la base d’une « assiette nouvel installé » (dite année n) pour l’année 2021 (les exploitations cotisent majoritairement sur une moyenne dite triennale ndlr). Cette mesure, simple et déjà en vigueur pour les exploitants touchés par la crise de la Covid-19 depuis le dernier projet de loi de finances rectificative, permettrait de caler l’assiette sociale avec la réalité des revenus perçus au titre de l’année 2021. En effet, pour les exploitants qui clôturent avant la moisson, le résultat de la mauvaise récolte 2020 ne sera visible que sur la clôture 2021, d’où l’option pour des cotisations 2021 basées sur le résultat de l’exercice clos en 2021. Une mesure indispensable pour pallier l’urgence de la sécheresse et dont le Parlement a été saisi par les Fédérations départementales des syndicats d’exploitants agricoles (FDSEA).
UN VIRUS QUI S’ATTAQUE AUX COURGETTES, CONCOMBRES ET MELONS DÉTECTÉ DANS LE SUD DE LA FRANCE
Le virus, déjà présent dans plusieurs pays d’Europe (Espagne, Italie, Portugal, Grèce) et ne présentant « aucun risque pour la santé humaine », a été détecté dans le sud de la France, en Occitanie et en Provence-Alpes-Côte d’Azur, selon le Ministère de l’Agriculture dans un communiqué publié le 21 octobre. Ce virus venant d’Asie, appelé Tomato leaf curl New Delhi virus (ToLCNDV), s’attaque aux cultures de courgettes, de concombres et de melons, il se propage notamment via l’intermédiaire d’insectes comme l’aleurode Bemisia tabaci, une petite mouche blanche. Pour contrer au plus vite ce ravageur, le Ministère annonce la mise en place de « des mesures conservatoires afin d’empêcher toute dissémination du virus », ainsi selon des protocoles sécurisés et contrôlés par les services de l’Etat, les plans concernés vont être détruits et une surveillance renforcée va être mise en place. Un plan d’accompagnement nécessite aussi d’être mis en place pour les exploitations touchées.
POINT D’ETAPE AUTOUR DE LA POLITIQUE AGRICOLE COMMUNE
Le mercredi 21 octobre, les ministres de l’Agriculture, réunis à Luxembourg, ont trouvé un accord sur la réforme de la PAC. Comme prévu, le principal point d’achoppement concernait l’architecture verte de la prochaine PAC, plus particulièrement les éco-régimes, c’est-à-dire des mesures pour accompagner les agriculteurs dans leur transition écologique comme l’agriculture de précision, l’agroforesterie, l’agriculture biologique, etc. Au bout du compte, et comme le souhaitait la France, les « éco-régimes », deviendront obligatoires pour tous les États membres et devront mobiliser au moins 20% des paiements directs, dès 2023. Une première phase transitoire de deux ans est néanmoins prévue, pour permettre aux États membres d’éviter de perdre des fonds, les éco-régimes étant facultatifs pour les agriculteurs. La partie était cependant loin d’être acquise entre la France et un certain nombre d’autres pays comme l’Allemagne, le Danemark, l’Espagne et la Belgique unis dans cette nouvelle architecture verte et les pays d’Europe orientale, notamment la Pologne, qui trouvaient cette ambition environnementale trop élevée. Le mandat des ministres permet donc de lancer les négociations avec le Parlement européen, qui parallèlement s’est réuni en séance plénière et a adopté, nettement, sa position sur la réforme de la PAC en rappelant son caractère commun et la nécessité de bâtir une architecture verte via les éco-régimes mais à un minima de 30% des paiements directs. Les grandes lignes de ces décisions ouvrent maintenant la voie à la tenue des trilogues entre le Conseil de l’UE, le Parlement européen et la Commission européenne, qui devront être finalisés au premier semestre 2021, pour permettre une entrée en vigueur de la future PAC au 1er janvier 2023. L’enjeu est donc maintenant d’apporter les améliorations au cadre réglementaire, afin que le projet de PAC permettre une agriculture source de valeur ajoutée pour les producteurs, résiliente face aux aléas climatiques et durable au regard des enjeux environnementaux. C’est par la négociation et le dialogue, chers à la construction européenne, que cette future PAC assurera la sécurité et la souveraineté alimentaire au bénéfice de tous les Européens.
EUROBAROMÈTRE 2020 : LES CITOYENS EUROPÉENS DÉFENDENT LEUR AGRICULTURE
Dans ce contexte, la Commission européenne, publiait le mardi 13 octobre son Eurobaromètre 2020, sur Les européens, l’agriculture et la PAC. Réalisé auprès de plus de 27 000 personnes, interrogées dans les 27 États membre, cet Eurobaromètre vient montrer la vision des citoyens européens sur les agriculteurs, leurs professions et la PAC. Ainsi, 95% pensent que l’agriculture et les zones rurales sont importantes pour « notre avenir » dans l’Union européenne. Aussi, 73% des citoyens européens connaissent la politique agricole commune, et ils sont 76% à estimer qu’elle profite à tous les citoyens, et pas seulement aux agriculteurs, soit 15 points de plus par rapport à 2017. Cependant, 39% pensent que le soutien apporté aux agriculteurs est trop faible et 56% souhaitent que l’Union européenne augmente son soutien. Les citoyens européens soutiennent les objectifs écologiques, puisque 52% pensent que l’un des principaux objectifs devrait être de protéger l’environnement et de lutter contre le changement climatique, et ils restent conscients des efforts fait par l’agriculture, avec 55% des citoyens qui pensent que l’agriculture a déjà apporté une contribution majeure à la lutte contre le changement climatique, soit 9 points de plus par rapport à 2010. Le rapport complet, avec des fiches par pays, sera publié en novembre. Mais d’ores et déjà l’Eurobaromètre montre bien que dans l’opinion publique européen, l’agriculture et le soutien aux agriculteurs reste la priorité pour continuer d’assurer une alimentation sûre, saine et de qualité.