N°71 – Semaine du 21 mars 2022
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GUERRE EN UKRAINE
UKRAINE : LES PROCHAINS SEMIS COMPROMIS
Tous les salariés des grandes exploitations ukrainiennes ne sont plus dans les fermes, mais mobilisés dans la guerre contre l’envahisseur russe. Tous ceux qui peuvent conduire un engin, tracteur en particulier, sont sur le front. Toutes les stations-services, dans les exploitations, ont été vidées par des tanks ou des camions militaires, pour que le gas-oil ne puisse pas être utilisé par les Russes. Livrer des pièces de rechange ou des engrais n’est possible qu’en risquant sa vie. Les semis de printemps, de tournesol de soja, et de céréales, ne pourront pas s’effectuer correctement et il y aura de nombreux hectares qui resteront inexploitées. Même si la guerre cessait rapidement, l’agriculture ukrainienne ne pourra pas retrouver sur le champ du personnel et des carburants nécessaires. La fenêtre des semis possibles va se fermer rapidement maintenant. Quant aux exportations, elles sont également compromises. Les silos et terminaux sur la mer d’Azov dans la zone de Marioupol sont définitivement détruits. Le port d’Odessa est encore intact, mais pour combien de temps ?
POLITIQUE AGRICOLE COMMUNE (PAC) : LES MINISTRES EUROPÉENS DE L’AGRICULTURE PLAIDENT POUR UNE RÉVISION DES PLANS STRATÉGIQUES NATIONAUX (PSN) POUR RELANCER LA PRODUCTION CÉRÉALIÈRE
La crise ukrainienne fait prendre conscience aux ministres de l’Agriculture européens, réunis le 21 mars, de la nécessité de relancer la production céréalière et de réviser les Plans Stratégiques Nationaux (PSN). Des mesures pourraient être envisagées pour amortir l’impact du conflit, non seulement à court terme, mais aussi pour ce qui est du renforcement de la sécurité alimentaire à long terme. Sans qu’aucune décision n’ait été prise à ce stade, la Commission a évoqué ce qui pourraient être accordées aux agriculteurs pour neutraliser la flambée du coût des carburants, l’augmentation du prix des engrais et des aliments du bétail. Ainsi, des aides pourraient être accordées au stockage notamment dans la filière porcine et des dérogations pourraient être décidées aux règles des jachères pour relancer la production de céréales dans l’Union européenne (UE). Cela permettrait de remettre en culture 4 millions d’hectares dans l’UE, alors que la prochaine PAC prévoit que les exploitations de plus de 10 hectares laissent au moins 4 % de leurs terres non cultivées. Autre mesure évoquée, le déblocage de la réserve de crise, dotée de 450 millions d’euros destinée à soutenir les agriculteurs en cas d’effondrement des prix à la production, une enveloppe qui pourrait être complétée par des aides des Etats. À plus long terme, la crise a interpellé les ministres sur les PSN et en présentant leur état d’avancement, le commissaire européen à l’Agriculture, Janusz Wojciechowski, a reconnu la nécessaire révision de certaines propositions initiales pour renforcer la résilience de secteur, et notamment un aménagement temporaire des règles environnementales. Mais sans remettre en cause la contribution de la PAC à la stratégie Farm to Fork et Biodiversité 2030. Le 30 mars, la Commission européenne doit adopter et transmettre ses recommandations aux États sur un premier lot de 19 PSN.
ACTUALITÉS AGRICOLES
PRESIDENTIELLES : GRAND ORAL AGRICOLE DES CANDIDATS LE 30 MARS À BESANÇON
La FNSEA reprend le rythme normal de ses assemblées générales et tiendra son 76ème congrès les 28 et 29 mars à Besançon dans le Doubs. Ce congrès est placé « sous le signe de la souveraineté : mode d’emploi ». Concrètement, la FNSEA veut faire passer le message qu’en ces temps troublés, les agriculteurs français ont la capacité à répondre aux défis qui se présentent, notamment sur la souveraineté alimentaire et énergétique. À l’issue de ce congrès, les candidats à la présidentielle viendront présenter leur vision de l’agriculture devant les 3000 agricultrices et agriculteurs présents, le mercredi 30 mars. Un événement organisé par Conseil de l’Agriculture Française (CAF). Retrouvez les 30 propositions de la FNSEA pour la présidentielle : https://www.fnsea.fr/elections-2022/
MANIFESTATION « ANTI-BASSINES » : LA FNSEA APPELLE A PROTEGER LES PERSONNES ET LES BIENS
A l’appel de nombreuses organisations environnementalistes et de la Confédération, une manifestation se tient les 26 et 27 mars dans les Deux-Sèvres contre les réserves d’eau. La FNSEA de son côté, tient « à apporter son soutien plein et entier à tous les agriculteurs du territoire concerné qui vont devoir supporter la stigmatisation intolérable à l’encontre de leur activité et subir un risque élevé de destruction des retenues d’eau et de violence auquel nous ont habitués les organisateurs de ce rassemblement », indique-t-elle dans un communiqué du 24 mars. Ce dernier ajoute : « Il est insupportable que des agriculteurs qui ont construit ces retenues d’eau en toute légalité et dans le respect du dialogue local soient aujourd’hui soumis à la pression de personnes qui remettent en cause leur projet d’entreprise et agissent au mépris du respect des personnes ». C’est pourquoi elle demande « formellement et fermement aux pouvoirs publics de protéger les personnes et les biens ».
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BAROMÈTRE HEBDOMADAIRE DES PRODUCTIONS AGRICOLES
Le baromètre hebdomadaire des productions agricoles et le fil rouge de l’actualité des filières nationales et de leurs marchés.
LA GRIPPE AVIAIRE DANS L’OUEST MENACE LA REPRISE DES ELEVAGES DANS LE SUD-OUEST
La filière palmipèdes gras a fait part de son inquiétude sur l’approvisionnement en foie gras d’ici la fin de l’année du fait de la grippe aviaire. Cette filière traverse l’une de ses plus graves crises, à peine le Sud-Ouest, première région productrice, sort-elle de la grippe aviaire, que l’épizootie vient toucher le deuxième bassin de production en France : les Pays de la Loire et notamment la Vendée. Une situation inédite pour cette région qui fournit 20 % du foie gras français mais surtout 72 % des canetons à engraisser. Cette région détient aussi les deux seuls sélectionneurs de France ainsi que de nombreux élevages de reproducteurs, essentiels pour la reprise de la production. Celle-ci est toujours prévue dans le Sud-Ouest pour le 29 mars mais la crise n’étant pas éteint dans l’Ouest, il reste quelques incertitudes quant à l’approvisionnement en jeunes volailles. Pour les producteurs de foie gras, cette nouvelle vague du virus H5N1 est la « crise de trop ». C’est en effet la quatrième crise que connaît la filière en 7 ans : 2015-2016 ; 2016-2017, 2020-2021 et 2021-2022. A chaque fois, des mesures drastiques ont été prises pour limiter la circulation du virus : mise en place de bandes uniques, sécurisation des transports ; mise à l’abri et dépeuplement préventif. Mais le virus continue sa progression sur le continent asiatique, en Europe et même aux Etats-Unis. L’Anses a été saisie pour enquêter et des défauts de sécurité ne seraient pas à exclure. Aussi, les éleveurs sont aussi confrontés à une flambée des coûts de production, sur une base 100 en 2014, nous avons atteint 138 en 2021. Cette somme de difficultés inédites amenuise encore plus une offre de foie gras qui pourrait être réduite en fin d’année. Les stocks de 2021 sont au plus bas voire épuisés la production de l’an dernier a atteint l’un de ses plus bas niveaux historiques depuis 2017 : 11 674 tonnes en 2021 (11 630 tonnes en 2017). La production 2021 a chuté de 20 % en comparaison de 2020 et de 30 % par rapport à 2019. Il y a seulement 8 ans, en 2014, la production française atteignait 26 600 tonnes.
LES PRODUCTEURS DE POMMES DE TERRE PRÉOCCUPÉS PAR L’EXPLOSION DES COÛTS DE PRODUCTION
La guerre en Ukraine fait hésiter les marchés de la pomme de terre sur la fin de cette saison et celle à venir, selon le Groupement des producteurs de pommes de terre du Nord-ouest européen (NEPG) qui rassemble quatre pays : Allemagne, Pays-Bas, Belgique, France. Toutefois, l’activité de transformation dans la zone NEPG fonctionne au maximum de ses possibilités actuelles et les transformateurs ont besoin de pommes de terre. Les usines s’inquiètent toutefois de la disponibilité et des coûts de l’huile de friture, ainsi que des difficultés logistiques (chauffeurs et camions, conteneurs et expédition). Cela devrait se traduire par des coûts plus élevés pour la chaine de transformation. Autre conséquence : des surfaces initialement destinées à la pomme de terre seront emblavées avec des céréales de printemps, du maïs grain ou du tournesol. Le prix des pommes de terre sera certainement plus élevé, que ce soit en frais ou en transformé. Les négociants ou les industriels devront pouvoir répercuter cette hausse et les consommateurs devront eux aussi payer plus cher selon le NEPG.
ALIMENTATION ANIMALE : PORCS ET VOLAILLES EN ZONE DE DANGER
Selon Agreste, les prix de vente des porcs et des volailles ne couvrent pas la hausses des coûts de l’alimentation. En janvier dernier, les prix à la production en aviculture auraient dû progresser de 11,2 % par rapport à leur niveau de l’année passée pour compenser la hausse du coût de l’alimentation (+16,1 %). Car la part des charges de l’alimentation dans la valeur du produit brut des exploitations a atteint 69,8 % en 2021. Or dans les faits, les prix payés aux aviculteurs n’ont progressé que de 5,4 % sur un an. En production porcine, l’effet ciseau prix-charges détériore fortement les marges des éleveurs. En janvier 2022, le prix de compensation du coût de l’aliment aurait dû augmenter de 11,6 % pour couvrir l’augmentation des prix de l’aliment (+18 %). Or le prix de vente des animaux n’a augmenté que de 2,1 %.
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