Le Projet Loi de Finances Rectificative (PLFR) présenté le 10/06 par le gouvernement devait être l’occasion de mettre en œuvre un soutien d’ampleur à la filière vitivinicole sous la forme d’exonérations de cotisations sociales à la hauteur de la crise qu’elle subit. Au final, la viticulture sera quasiment exclue. Peu à peu, la déception voire le ressentiment s’installe dans les vignobles. Le gouvernement doit revoir d’urgence sa copie.
Fermeture administrative des CHR, coup d’arrêt sur l’export, la filière vitivinicole a été frappée de plein fouet par les conséquences de la crise sanitaire. C’est au moins 1,5 milliard d’Euro de chiffre d’affaires qui se sont évanouis avec la fermeture administrative des CHR, la mise à l’arrêt du tourisme, la fermeture des salons, l’annulation des mariages etc. Or, à l’inverse de nombreux secteurs économiques qui ont bénéficié du chômage partiel, les entreprises vitivinicoles ont continué à travailler et à rémunérer leurs salariés pendant la crise. Pratiquement sans cette aide, nous avons préservé les emplois. Crise sanitaire ou non, la vigne continue de pousser. Au total, la viticulture a versé 4,5 milliards d’euros de salaires sur 4 mois.
Il faut ajouter à cela le conflit entre l’Europe et les USA sur l’aéronautique, dont la filière vitivinicole est une victime collatérale. Les vins français sont taxés à 25% depuis octobre 2019 à leur entrée sur le sol américain, leur 1er marché à l’export.
L’enchainement de ces crises a des répercussions sur l’ensemble des marchés viticoles. Toutes les exploitations sont frappées sans exception, du vigneron vendeur de bouteilles à la coopérative, en passant par les vignerons vendeurs de raisins et les négociants. Cette crise de la vitiviniculture qui a déjà commencé depuis octobre dernier ne sera pas terminée avec la réouverture des CHR et des frontières. Pour de nombreuses exploitations, les répercussions seront décalées dans le temps et pèseront fortement dans les mois à venir.
A plusieurs reprises, les ministres B. Le Maire, G. Darmanin, O. Dussopt et D. Guillaume ont annoncé des mesures d’exonérations de cotisations sociales pour notre filière. A la présentation du PLFR, l’amertume est grande et la colère monte. Les exonérations ne seraient accordées qu’aux seules entreprises qui ont subi une perte de CA d’au moins 80 % entre le 15 mars et le 15 mai. Ce seuil de 80% est inacceptable. Nous sommes très loin du « quoi qu’il en coûte » présidentiel.
Au regard des milliards d’euros de soutien annoncés pour l’Automobile, Air France, et l’Aéronautique, qui ont déjà très largement bénéficié du chômage partiel, au regard des demandes de l’ensemble de la filière vitivinicole en faveur d’un plan de 500 millions d’euros, ce projet de loi sonne creux pour le vignoble. Sur le terrain, les viticultrices et les viticulteurs ressentent une grande injustice et estiment ne pas être perçus par les pouvoirs publics comme le poids lourd de la balance commerciale française qu’ils sont pourtant. Faut-il rappeler qu’ils représentent 600 000 emplois directs et indirects, principalement dans des territoires ruraux, et que participant à l’équilibre économique de nombre d’établissements du secteur de la restauration, c’est bien davantage d’emplois encore qui sont induits par notre secteur ? La vitiviniculture est sévèrement touchée, elle ne veut pas couler.
Si le gouvernement ne revoit pas sa copie, les vignerons seront abandonnés et leurs parlementaires auront été trahis. Il faut créer un dispositif d’exonération de cotisations spécifiques à la vitiviniculture qui concerne un plus grand nombre d’exploitations. C’est la condition pour éviter que la colère éclate.
Au centre des propositions des organisations de la production vitivinicole nous demandons que les dispositifs d’exonérations du projet de loi de finances rectificative n°3 (exonération de charges patronales sur les salaires, crédits de cotisations de 20%, exonération des cotisations des non- salariés agricoles) s’appliquent aux entreprises de la filière vitivinicole dans les conditions suivantes :
Exonération à hauteur de 100% au-delà de 60% de perte de chiffre d’affaires entre le 15 mars et le 15 mai.